Avec la participation de Arnaud Danjean, Renaud Girard, Gilles Kepel, Guillaume Poupard, Pierre Vandier et animé par Aude Leroy.
Verbatim
- Gilles Kepel : "La chute de Kaboul a été une énorme claque vingt ans après le 11 septembre. Les menaces terroristes sont donc redevenues un point central."
- Arnaud Danjean : "Au-delà de ce qui se passe à Kaboul et du fiasco de l’engagement militaire, n’oublions pas qu’au départ, c’est Al Quaida que nous combattions et pas les Talibans en tant que tels."
- Pierre Vandier : "Cette crise de Kaboul va marquer un changement géopolitique, on ne peut pas demander à des militaires de se battre sur un plan idéologique."
- Renaud Girard : "En fait, il y a eu deux guerres en Afghanistan, la première parce que les Talibans avaient refusé de livrer Ben Laden et la deuxième parce que les Américains ont promis de créer la démocratie en Afghanistan. Une place est libre aujourd’hui pour la Chine."
- Arnaud Danjean : "N’oublions pas que la campagne afghane est restée très islamiste. Dès lors que depuis trois ans le retrait américain était engagé, on ne peut pas vraiment s’étonner, même si le retrait a été catastrophique."
- Guillaume Poupard : "Les mouvances islamistes ont montré une véritable appétence pour le numérique pour faire de la com. Mais pour le moment, nous n’avons pas de cyber terrorisme… mais cela peut changer et nous devons nous en prémunir."
- Guillaume Poupard : "Aujourd’hui, la menace cyber est partout et elle est multiforme. Il n’y a aucune éthique, c’est pire que le Far-West."
- Guillaume Poupard : "Ce que l’on voit au quotidien en matière de cybercriminalité fait froid dans le dos. Mais aujourd’hui, heureusement, il y a une prise de conscience."
- Guillaume Poupard : "Lutter contre ces menaces, c’est l’affaire de tous."
- Gilles Kepel : "Le djiadhisme est tout de même entré dans le monde cyber pour former les nouveaux djihadistes."
- Pierre Vandier : "Les hommes forts du cyber sont des puissances etatiques. Aujourd’hui, on doit intégrer les risques cyber dès la conception des systèmes."
- Arnaud Danjean : "Se défendre, c’est une chose, mais il faut aussi être capable de s’en prémunir, puis de riposter."
- Arnaud Danjean : "Si on ne peut identifier qui est à l’initiative de l’attaque, on ne peut pas se défendre. C est tout le problème du cyber."
- Renaud Girard : "Ce sont essentiellement la Chine et la Russie qui mènent des attaques cyber."
- Guillaume Poupard : "Il faut avant tout se défendre, mais on ne peut faire cela à l’échelle nationale, il faut le faire soit dans le cadre de l’Europe, soit dans le cadre de l’OTAN."
- Pierre Vandier : "Aujourd’hui, les biens communs, notamment les océans, sont contestés et territorialisés à l’encontre du droit international."
- Arnaud Danjean : "Nous avons la chance d’avoir une force armée agissante, ce qui est un atout par rapport aux pays qui nous entourent. Mais ma crainte, c’est le décalage entre nos ambitions et les moyens que nous ce mettons au service de ces ambitions."
- Renaud Girard : "Nous sommes dans un monde de plus en plus dangereux et nous baissons la garde, ce qui n’est pas raisonnable."
Pour aller plus loin
Les sentinelles de la Liberté : pourquoi se bat-on ?
Des militaires dans nos rues pour nous protéger, nos soldats en Afrique contre le totalitarisme et les terroristes. Nos hôpitaux militaires mobilisés face au virus et un budget de la Défense toujours en débat. Quelles sont aujourd’hui les armes de la liberté ? A-t-on encore la légitimité d’aller défendre la liberté en dehors de ses frontières et en a-t-on encore les moyens ?
Les opérations militaires extérieures (OPEX) sont des engagements de forces militaires hors du territoire national, sur un théâtre de crise ou de conflit. Si, historiquement, elles avaient surtout des visées de conquête, depuis l’adoption de la charte de l’ONU elles ont changé de but, sans toutefois disparaître. Encadrées par le droit international, elles contribuent aujourd’hui soit au maintien de la paix, soit au soutien des populations civiles en cas de catastrophe. Irak, Syrie, Centrafrique Sahel… les théâtres d’opération sont multiples. Selon un récent sondage, pour les Français, ces opérations se justifient, notamment quand il s’agit d’apporter des secours à des ressortissants français, de fournir une aide humanitaire, de détruire des foyers de terrorisme, de faire respecter le droit international ou de ramener la paix… Mais les OPEX coûtent cher (1,1 milliard d’euros millions pour 2020) sans compter le coût humain, et posent la question de leur légitimité et du droit d’ingérence.
Le principe de non-intervention et le droit de tout Etat à conduire ses affaires sans ingérence est un des fondements du droit international. Mais en 1988 et 1990, deux résolutions de l’ONU instaurent un nouveau droit qualifié de « droit d’ingérence » ou de « droit d’assistance » face notamment au drame du Rwanda. Désormais, en cas de catastrophe naturelle, de répression politique, ou de génocide..., la communauté internationale peut apporter tous les secours requis, y compris par voie militaire et même sans le consentement des Etats concernés. Reste à savoir s’il est opportun pour les nations démocratiques d’intervenir partout pour libérer des peuples parfois contre leur gré ? L’exemple de l’Afghanistan est à ce titre probant. Au risque de laisser le pays aux mains des Talibans, Joe Biden a décidé le retrait total des troupes américaines d’Afghanistan, en estimant que « c’est le droit et la responsabilité du seul peuple afghan de décider de son avenir et de la manière dont le pays doit être dirigé ». Bien sûr, au moment où les Etats-Unis sont en proie à la pire crise sanitaire de leur histoire et à une crise économique, ce retrait se justifie aussi parce que la guerre en Afghanistan a tué près de 2 500 GI’s, et coûté 2 000 milliards de dollars.
Droit d’ingérence vs droit des pays à disposer d’eux-mêmes, on le voit la question est difficile, les intervenants à ce débat chercheront à y apporter des réponses.